Je ne suis pas allée manifester ce matin avec les Gilets jaunes, et pourtant je fais partie du cœur de cible de cette colère.
J’habite en zone périurbaine dans une région en voie de métropolisation. Dans mon foyer, nous avons deux voitures, deux diesels, tout simplement parce que nous faisons plus de 60 kilomètres par jours pour nos déplacements professionnels. Ma maison se trouve dans une zone éloignée du centre-bourg : quand je veux faire quelque chose, ne serait-ce qu’acheter du pain, il me faut ma voiture… sinon c’est 10 km aller-retour en vélo… franchement je peux le faire un dimanche matin d’été, mais pas tous les jours ! Pour aller à la Poste, au marché, chez les producteurs locaux, au supermarché, chez le médecin, à la pharmacie… tout, absolument tout se fait en voiture ! Si je voulais aller travailler en transport en commun sans voiture, il me faudrait prendre mon vélo et faire déjà 15 km aller pour me rendre à la gare SNCF la plus proche… puis prendre un train… puis prendre deux trams pour me rendre au nord de Nantes où je travaille pour l’instant ! Ce que je fais en 30 ou 45 minutes quand les bouchons nantais sont trop importants soir ou matin, je devrais le faire en 2 heures au moins ! Mais bien sûr…
Je vais sans doute avoir plus de trajets en voiture à faire avec, je l’espère, le développement de mon activité indépendante.
La culpabilisation, cela ne fonctionne pas
Cela fait 8 ans que je ne suis pas sortie de France et que je n’ai pas pris d’avion pour polluer comme le fond les urbains qui passent leurs week-ends dans des capitales européennes ! Quand je voyage, j’essaye de prendre le train, mais c’est très cher.
J’ai acheté ma voiture il y a 5 ans, on m’a conseillé un diesel parce que je faisais beaucoup de kilomètres. J’ai longtemps hésité alors, car je n’avais eu auparavant que des voitures essences. Mais j’étais une urbaine, je faisais de petites distances en zone urbaine. Aujourd’hui, on me dit en tentant bien de me culpabiliser, que je pollue avec mon diesel, avec tous mes trajets, que je devrais faire un effort… Les efforts je les fais : j’achète bio au maximum, la plupart du temps en circuit court (j’ai la chance d’habiter une région riche en maraîchages et en élevage), j’achète beaucoup en vrac, je réalise des produits cosmétiques ou d’entretien par moi-même, j’ai un petit potager dans mon jardin, toutes mes prises électriques sont équipées d’interrupteurs qui sont éteints quand on ne se sert part des appareils électriques…
Comme beaucoup de personnes aujourd’hui, j’en ai assez de m’entendre dire qu’il faudra bien passer par l’arrêt de la pollution automobile. Certes, mais pas comme ça et pas en forçant les choses.
Pas de capitalisme, pas de voitures…
D’autant plus que, à mon sens, l’hypocrisie de ce gouvernement et de toutes les élites est de nous regarder dans le blanc des yeux en nous affirmant que c’est la meilleure chose pour la transition écologique. Mais comme le disait Nicolas Hulot quand il a démissionné, ce ne sont que de petits pas. Et surtout, ce sont des petits pas qui ne remettent pas du tout en cause le modèle capitaliste et financier dans lequel la plupart de nos contemporains se vautrent toujours. La contradiction est là : on taxe le carburant et on ponctionne ceux et celles qui utilisent leurs voitures pour aller travailler… travailler pour gagner un salaire et toujours et encore nourrir le capitalisme néo-libéral ! Se passer de la voiture ne sera possible que lorsque les gens ne seront pas obligés de se lever à 6h du matin pour aller bosser pour payer leurs factures à de grands groupes avides et cyniques, ou payer des impôts à un État qui privilégie déjà les plus riches. Aujourd’hui, dans notre façon de vivre hyper individualiste et où le profit est la seule doctrine, on ne peut pas se passer de la voiture, c’est tout. C’est bien la question du travail, de ce que l’on veut faire de nos journées qui est sous-jacente à cette question des taxes. Pour ma part, je peux largement travailler de chez moi, faire du télétravail comme on dit : je le fais avant tout parce que cela m’évite de prendre ma voiture et de me retrouver sur le périphérique nantais dans les bouchons à dépenser le peu d’argent que je gagne en carburant. Et j’ai décidé aussi de travailler autrement : je n’ai pas qu’une seule activité, qui me pompe toute mon énergie et mon temps. Je suis slasheuse, c’est-à-dire que j’ai trois activités principales, pour au total un salaire bien moindre que lorsque j’étais professeure, mais quelle liberté et quel challenge !
Plus de voitures ?
Nous n’aurons plus besoin de voitures qui polluent quand nous ne serons plus obligés d’être des esclaves qui passent leurs journées à travailler pour des patrons, pour gagner de l’argent qui sert à en payer d’autres patrons… Nous n’aurons plus besoin de voiture quand nous ne serons plus pressurisés par le temps accéléré d’une société où la rapidité à remplacé l’efficacité et la rigueur et où le vite est plus important que le bien ! Nous n’aurons plus besoin de voiture quand nous arrêterons de bétonner nos territoires et où les institutions qui nous gouvernent (mal) auront le courage de mettre en œuvre de vraies politiques territoriales et locales où l’équité sociale sera au centre du dispositif.
Je comprends bien ton point de vue – mais vivre à la campagne ou presque comporte bien des avantages : tu as ton jardin, le bon air, de l’espace. C’est ton choix ! Tu ne peux tout trouver … la porte à côté.
amicalement 🙂
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Je sais très bien qu’à la campagne on ne trouve rien à côté de chez soi. Mais j’en ai assez que l’on me « reproche » d’utiliser ma voiture alors qu’il n’y a pas de transports en communs, pas de pistes cyclables, pas de passerelles piétons pour traverser les voies rapides. Je ne changerais pas mon sort pour retourner à la ville, mais il faudrait que l’on pense aussi à la « vie à la campagne » comme autre chose qu’un coin charmant pour urbains déphasés ! C’est ce que l’on appelle les conflits d’usages.
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Tout à fait d’accord avec Sarah. Je vis moi-même dans une petite commune située à 30 kms de la grande ville la plus proche ce qui suppose des sacrifices pour lesquels on ne doit à aucun moment culpabiliser. Moi aussi j’essaie de faire le maximum de mes déplacements en vélo, à pieds ou en transports en commun, mais ce n’est pas toujours possible!!! Peu ou pas de transports en commun dans les petites agglomérations, les tarifs de plus en plus prohibitifs du train et les TER de moins en moins nombreux ne nous aident pas à protéger notre planète et notre porte-feuille. Alors taxer à mort l’essence est tout simplement un coup bas, une hypocrisie éhontée…
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Le coût du déplacement (35 kilomètres, 70 aller – retour) double en ce moment le prix de ma place de cinéma. Du coup, on n’y va pas souvent. Pareil pour les spectacles, pour les concerts, pour… tout, en fait. Parce qu’à la campagne, comme tu dis, on ne fait pas grand chose sans la voiture. Parce qu’à la campagne, on se fout pas mal de donner aux gens un accès à la culture. En même temps, n’est-ce pas cela qui permet de les maintenir dans l’ignorance et de mieux les dompter ?…
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