Un an après : quel bilan pour la démocratie participative à Malville

15 mars 2020. La liste « Agir ensemble pour Malville » est élue au premier tour des élections municipales avec 51% des voix exprimées. Notre liste porte depuis un projet politique de gouvernance participative avec les citoyens et les agents municipaux. Un an a passé, nous avons été installé en pleine crise pandémique et nous avons dû mettre en place notre projet collaboratif alors même que l’épidémie de Covid-19 empêche encore les réunions, les rencontres, le travail co-construit. Quel bilan tirer de cette première année si unique ?

Installation et mise en place des comités participatifs


Le conseil municipal a été mis en place le 27 mai 2020 et dès le second conseil de juin nous avons créé des comités participatifs qui remplacent les commissions municipales. Les commissions sont des organes issus du conseil municipal, donc réservés aux élus. C’est l’article L.2121-22 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) qui donne le cadre légal de ces commissions : elles ne sont pas le lieu de décision mais des commissions d’études qui donnent de simples avis au conseil municipal. Souvent cloisonnées et peu transparentes, les commissions municipales manquent d’esprit démocratique et d’agilité quand il s’agit de porter des projets stratégiques ou des visions transversales autour de plusieurs champs d’action.


A Malville, nous avons donc décidé de remplacer ces commissions par des comités citoyens. Seules deux commissions restent en l’état réservées aux élus : la commission finance et celle du personnel municipal (RH).
Les comités participatifs sont des entités de travail, dont l’objectif est de présenter au conseil municipal des projets ficelés, travaillés et co-construit avec les agents et les citoyens. Ils recoupent plusieurs domaines d’intervention et peuvent travailler conjointement dans le cadre de projets transversaux.
Il a été créé 6 comités participatifs baptisés d’acronymes qui définissent leurs champs d’action:

  • UVP pour Urbanisme, Voirie et Patrimoine ;
  • ACE pour Attractivité, Commerces et Entreprises ;
  • IAC pour Intergénérationnel, Affaires scolaires et Cohésion sociale ;
  • CSVAC pour Culture, Sport, Vie associative et Communication ;
  • BVR pour Bien Vivre sa Ruralité et Cadre de vie ;
  • MDP pour Mobilités, Développement durable et PCAET (le pacte climat).


Les comités participatifs sont co-présidés par trois personnes : deux élus et un citoyen. Les deux élus sont l’adjoint en charge du domaine travaillé par le comité et un conseiller municipal délégué. Le co-président citoyen doit être choisi parmi les participants volontaires de chaque comité. A cette date, ces co-présidents n’ont pas pu encore être élus car les réunions des comités sont largement perturbées par la crise sanitaire. En effet, comment choisir une personne quand le travail en commun n’est pas vraiment possible, les rencontres intersubjectives très limitées, les réflexions sur les projets portés encore balbutiantes ?

des citoyens au rendez-vous

Les élus ont travaillé durant l’été 2020 à la mise en place des comités pour qu’à l’automne les citoyens candidats puissent les intégrer.
Un processus a été mis en place :
1° tous les candidats ont été reçus par les deux co-présidents élus pour leur présenter le comité, la façon de travailler, les valeurs et leurs engagements attendu.
2° des réunions en présence ont été organisées en septembre 2020 avec les élus, les agents et les citoyens candidats. Ceux-ci ont dû signer une charte d’engagement pour au moins un an.
3° lors du conseil municipal d’octobre 2020 une délibération a validé les noms des candidats retenus et la composition de chaque comité participatif.
4° novembre 2020 : second confinement ! Les réunions ne peuvent plus se tenir en présence, les co-présidents organisent comme ils le peuvent des réunions par visio-conférence.
Depuis, les comités fonctionnent mais pas comme ils le devraient : nous tentons d’inventer des moyens numériques pour faciliter la participation mais pour certains habitants c’est difficile de passer à ce fonctionnement et tout le monde n’est pas en capacité de suivre ce modèle.
Actuellement, il y a 49 personnes inscrites aux comités. Le nombre des participants est très hétérogène selon les comités, de 5 membres citoyens à 12 pour les plus attractifs. Les deux comités dont les sujets ont le plus intéressés les citoyens sont les comités MDP et UVP. Par contre, il y une nette sous représentation féminine avec seulement 13 femmes inscrites aux comités ! Il faudra sans doute s’interroger sur cette problématique, et se demander si cet écart est une question de représentation de l’engagement politique ou bien un problème de charge logistique à la maison, les réunions ayant lieu le soir !

la place centrale des agents municipaux

La force des comités participatifs n’est pas seulement dans la participation citoyenne. Elle est dans l’intégration de trois communautés apportant des compétences différentes : les élus portent la vision politique, les citoyens d’autres compétences et un engagement collectif et les agents leur expertise technique et légale. En effet, les comités participatifs ne peuvent réussir que si les agents municipaux entrent dans le projet et le portent au même titre que les élus. Non seulement car ils sont ceux qui « font » mais surtout parce qu’ils sont une ressource d’expertise, d’expérience, de savoir et de savoir-faire absolument indispensable. Après un an en tant qu’élue municipale, je constate que c’est le point crucial de la réussite du projet, avec l’animation des comités.
De ce fait, on constate que le couple « agent-élu » est essentiel et qu’il s’agit là d’une collaboration névralgique qui s’est mise en place rapidement et totalement à Malville grâce à un enthousiasme des agents et surtout des chefs de service pour le projet politique porté par la nouvelle municipalité. A la tête de ce modèle, l’entente entre madame le maire et la directrice générale des services (DGS) est l’une des clés de la réussite du mandat. Cette entente est faite de confiance et de délégation où chacun sait quelle est sa place et son rôle. Pour cela, les nouveaux et même les anciens élus ont reçu une formation de deux jours sur la place des élus au sein des services municipaux. Cette relation est subtile car madame le maire est l’employeur et nous, les élus, devons ne pas outrepasser nos fonctions. De ce fait, concrètement, lors des réunions des comités, c’est l’agent en charge du projet travaillé ce jour qui présente les données techniques, et même qui participe à l’animation de la réunion. Cela demande un travail supplémentaire mais d’après les retours que j’ai pu avoir, ils sont satisfaits car leur travail est reconnu et qu’ils participent vraiment à la vie de la commune.

l’investissement des élus

Pour les élus, en particulier les adjoints et les conseillers délégués, co-présidents de comités, cela demande également un investissement personnel important. Outre la gestion quotidienne de la commune, il a fallu apprendre rapidement à animer des réunions publiques. Ce n’est pas si facile pour tout le monde et ce n’est pas forcément ce que l’on attend d’un élu « classique ». Mais la liste majoritaire a su créer au fil de la campagne électorale une entente qu’il s’agit à présent de préserver et de renforcer. Encore une fois, la situation de crise dans laquelle nous évoluons actuellement ne facilite pas du tout les choses, car les rencontres ne sont pas possibles alors qu’elles sont le cœur des projets collaboratifs. Comment travailler ensemble s’il n’est pas possible d’apprendre à se connaître vraiment ? L’atout majeur de notre liste est qu’elle est composée de personnes qui, comme moi, ont l’habitude de travailler et d’animer des projets collaboratifs et d’autres (certains déjà élus) qui ont pris le train de la gouvernance participative en marche avec une vraie volonté de faire changer les choses. Cette attitude est souvent née d’une forte déception face aux façons archaïques et presque anti-démocratiques de faire de la politique locale. Le fonctionnement municipal est fortement pyramidal et nous avons essayé de le rendre un peu plus horizontal. Ainsi, tous les élus reçoivent une indemnité municipale, proportionnelle à leurs responsabilités au sein de la commune. De même, les astreintes que les adjoints doivent tenir les soirs, les week-ends et les jours fériés (quand la mairie est fermée) ont été répartis avec les conseillers délégués et une formation a été mise en place.

des projets pour la commune

Malgré les difficultés dû à la période que nous vivons, les comités ont travaillé et des projets ont été présentés au conseil municipal et sont en train d’être mis en œuvre. Ainsi, le comité ACE met en place un marché de producteur qui devrait être inauguré le 5 juin prochain. Pour cela, il a organisé un sondage de la population malvilloise qui a recueilli 600 réponses ! On voit donc que même si tous les habitants n’investissent pas du temps et de l’énergie dans les comités proprement dits, leur intérêt pour la consultation citoyenne est réel. Le comité IAC dont j’ai l’honneur d’être l’une des co-présidente, travaille à la mise en place d’un pedibus pour les écoliers du bourg. Nous avons défini avec les citoyens et les agents trois trajets pour permettre aux écoliers et des accompagnateurs bénévoles de se rendre à pied aux écoles. Un sondage en ligne a permis de recueillir presque 70 réponses avec plus de 55 écoliers intéressés et une dizaine de personnes prêtes à être bénévoles pour accompagner les enfants. Des réunions (en présence ? En visio ?) sont prévues dans les semaines qui viennent pour affiner le projet avec toutes ces citoyens. Le comité CSVAC a organisé un concours photo pour illustrer la couverture du magazine trimestriel de la commune. Le comité BVR a développé une nouvelle collaboration avec l’ONF pour la gestion des bois communaux.

Pour conclure cet article je ferais le constat suivant :

  • À Malville nous mettons en place, discrètement mais avec une certaine efficacité, un vrai projet de démocratie participative
  • La crise sanitaire freine largement le développement de ce projet de gouvernance et que cela entraîne des frustrations mais aussi des incompréhensions
  • Que nous essayons de nous adapter avec plus ou moins de succès mais que rien de remplacera l’humain, la rencontre et le faire ensemble en direct, en présence
  • Comme pour tous projets coopératifs, nous apprenons en faisant, tous ensemble.


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6 commentaires sur “Un an après : quel bilan pour la démocratie participative à Malville

  1. Bonjour,

    Je suis néanmoins surpris qu’à l’unanimité la communauté de communes Loire et Sillon ait eu votre voix pour voter le scandaleux systèmes des taxes incitatives du ramassages des déchets et ordures ménagères.

    Parce que si on évoque la démocratie participative, ce scrutin est tout sauf démocratique…

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    1. Bonjour, je décris la vie dans la commune de Malville et non pas dans l’intercommunalité. Il n’y a pas de démocratie participative au niveau de la communauté de communes mais cela peut être un objectif pour l’avenir.

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  2. Félicitations aux habitants de Malville et à son équipe d’élus ! La démocratie participative, associée à une gouvernance partagée, nous emmènera durablement vers de meilleurs choix de société

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