Voilà un mot d’actualité pour mon XYZ de la philo !
Il existe plusieurs sortes de candidats. On peut être candidat une élection, par exemple une élection présidentielle 😉 ; on peut être candidat à un examen, par exemple candidat du baccalauréat ; on peut enfin être candidat à un jeu, par exemple candidat à un jeu télévisé.
Le mot candidat vient du latin, candidatus, qui veut dire blanc, et qui désignait ceux qui vêtus d’une toge blanchie à la craie sollicitaient une charge publique. De cette étymologie on tirera aussi candide… c’est-à-dire innocent. On voit déjà là poindre une belle contradiction avec certains sous-entendus actuels autour du mot candidat.
Innocent, le candidat ?
Le candidat est donc celui qui doit se montrer le plus blanc possible, c’est-à-dire sans tâche, sans opprobre, sans indignité pour ensuite faire ses preuves lors d’une épreuve initiatique. Cette épreuve peut être celle d’un vote, d’un examen, une épreuve physique : en tout cas le candidat doit passer sous des fourches caudines. Cela me fait penser à l’épreuve finale de l’agogè, la très stricte et rude éducation spartiate antique où les adolescents devaient passer sous les fouets des adultes pour aller voler un fromage sur un autel. Il y a donc bien un aspect initiatique dans le fait de candidater, comme on le dit encore souvent par exemple pour le baccalauréat et justifier son maintien, en tout cas sous forme d’examen final.
Le candidat doit être blanc, presque transparent : il doit tout montrer, montrer ce dont il est capable, montrer ce qu’il sait faire, ce qu’il sait, ce qu’il peut faire. Il doit se dévoiler au maximum de son intimité. Le candidat se trouve sur un fil étroit car il est sous le regard de ses juges, qu’ils soient électeurs ou un jury ou même des téléspectateurs. La candidature est bien un spectacle qui exige que l’on se livre tout entier et que l’on se délivre de tout mystère. Il faut se dévoiler.
Mais ce dévoilement peut être aussi une partie de bluff : les candidats peuvent très bien tricher, jouer, ne pas tout dire, mentir, trahir ce qu’il sont pour pouvoir obtenir ce qu’ils veulent. Ils sont libres tout en étant partie prenante d’un cadre très précis, celui d’une élection ou d’un examen ou des règles d’un jeu.
Une épreuve
Il doit aussi faire cet effort de se montrer tel qu’il est pour passer la concurrence et la compétition des autres candidats. Car en effet, il y a toujours des candidats : c’est une situation collective qui se termine binairement par une validation ou non. Il y a les élus et les autres, les reçus et les recalés, les vainqueurs et les vaincus. Cette idée de l’effort fait que la posture du candidat est particulièrement instable, désagréable et donc provisoire. On ne peut rester candidat toute sa vie, c’est une transition, une étape, un moment, unique et étrange.
Presque de façon psychanalyste, je dirai que le candidat, même s’il dit constamment « je » n’est pas lui-même dans cette étape transitionnelle. Il est d’ailleurs en plein transfert : il devient autre, un autre que lui-même ou bien lui-même s’il envisage cette épreuve sous une forme de sincérité et d’honnêteté. L’instabilité provisoire de la situation doit lui permettre d’entrevoir une stabilité, après coup, au-delà, constituée d’une forme de reconnaissance de ses pairs. La candidature est angoissante mais elle présage une futur radieux ou en tout cas un avenir meilleur.