Eh voilà, il fallait s’y attendre : malgré le demi Lexomil je n’arrive pas à dormir ! Je revois, les yeux fermés, l’accident de cet après midi, le choc et la peur qui m’a prise. Et si j’avais été blessée … qu’il est difficile après un tel stress de lâcher prise ! Mon cerveau carbure et les images s’entrechoquent : je pense que c’est ce qu’on appelle un traumatisme. Il faudra voir plus tard quelles traces mnésiques vont rester accrochées à mon inconscient. Déjà, lors de mon accident dans les montagnes de l’Himalaya à la frontière entre le Tibet et le Népal, j’avais ressenti cette mili-seconde, cette fraction du temps où on voit, avec une précision folle, que tout bascule, que la force d’un événement va bouleverser son monde.
J’ai écrit tout à l’heure, dans mon billet précédent, quelques mots mystérieux à propos du karma. Cette notion bouddhiste très mal comprise en Occident n’a rien à voir avec la fatalité ou le destin. Le karma c’est l’acte, c’est la volition, le volonté de faire ou de penser, et de croire qu’il existe quelque chose plutôt que rien. Si on s’accroche de trop à cette volonté d’agir ou de pensée alors il y a souvent de la souffrance au bout du chemin, surtout quand cette action est « négative », faite d’une émotion douloureuse, comme la colère, l’agressivité, la haine, la peur, l’égoïsme, l’orgueil. Et cette journée de mercredi fut pour moi une telle cascade d’émotions violentes, douloureuses, agressives. Rien à voir avec quelqu’un, juste des réactions forts désagréables vis-à-vis de moi-même, domestiques en quelque sortes ! Comme un laisser aller négatif, comme si un petit diablotin prenait pour quelques minutes possession de ma volonté et que je m’énerve sans raison sur des broutilles. Et quand j’ai pris la voiture cet après midi, j’ai ressenti comme un flash, comme un effet boomerang de ce qui allait ce passer… allez vous me croire ? oui, j’ai eu un pressentiment de cet accident, cette pensée qui fait irruption au volant qu’il va se passer quelque chose, comme si la logique, de la cause à l’effet de cette journée particulière allait dans une évidence glaciale se terminer sur un terre-plein. Voilà pourquoi, hors du traumatisme lié précisément au choc de la voiture fuyarde, cet événement me semble bien plus positif qu’autre chose : prise de conscience aiguë de la responsabilité inéluctable de tous nos actes, de nos volontés.
L’esprit, l’inconscient enregistre absolument tout ce qui nous arrive, même les plus infimes parcelles des événements extérieurs. Mais la plupart du temps la conscience, cet outil de confusion, cette perte de temps (!) oublie tout cela car le plus important n’est pas dans ces détails. Sauf que parfois, sous le coups d’un autre événement intérieur ou extérieur, peut ramener sur le devant de la scène consciente ces petits riens du quotidien et provoquer alors de vrais dégâts, car on ne comprend pas pourquoi ces émotions nous envahissent. C’est la genèse de la plupart des phobies. Ce que je viens de vivre est le type même, puissance 10, du genre de traces qui se logent dans tous les recoins de notre mémoire. Je ne voudrais pas, en fait, qu’il en restât quoique ce soit dans ma conscience que j’essaye, avec force détergeants, de nettoyer jour après jour, pour être la plus « clean » possible.
Demain matin (en fait dans quelques heures :-)) je vais devoir aller voir la police pour porter plainte pour délit de fuite, mais je vais passer par le cabinet de mon médecin, car mon dos et ma nuque me font vraiment souffrir : peut-être qu’un certificat médical facilitera le dépôt de ma plainte, car il s’avère que les flics ne sont pas toujours conciliant pour ce genre d’affaire où il n’y a pas de témoins.