Voici quelques constats concernant le process de Parcousup pour cette première année. Cela n’a pas pour vocation d’analyser en profondeur la manière dont ont été orientés les élèves de terminale de cette année, mais de proposer des remarques toutes personnelles, d’une future-ex-professeure en lien avec des élèves. J’avais déjà donné mon avis au début de l’année.
Pas de vœu préféré
Tout d’abord, le fait que cette année, contrairement à APB, les candidats n’ont pas indiqué quel était leur vœu d’orientation préféré fausse grandement le jeu et surtout la comparaison entre Parcousup et APB. Ainsi, quand aujourd’hui, le ministère nous annonce que 81% des élèves de terminale ont vu au moins l’un de leur vœu comblé, c’est oublié de préciser que pour un grand nombre (mais quelle proportion ?) ce vœu n’est pas du tout ce qu’ils souhaitent faire l’année prochaine. En fait, les professeurs principaux, qui se sont vus délégués la tâche plutôt sensible de préparer leurs élèves à l’orientation, ont tous à peu près tenu le même discours : élargir les vœux non seulement géographiquement, mais surtout dans des filières qui ne soient pas (trop) sélectives et/ou qui correspondent davantage 1° au niveau scolaire de l’élève, 2° à sa filière, 3° à ses capacités de réussite dans le supérieur. Et nos élèves, bons petits soldats, ont, pour la plupart joué le jeu. Ceux qui ne l’ont pas fait et qui n’ont fait que des vœux sélectifs (STAPS, Psycho, BTS, DUT, IUT, écoles d’ingénieur ou de commerce) ont beaucoup plus de chance de n’avoir aucun vœu comblé : ce sont les 19% restant sur le bord de la route à deux jours des résultats du bac ! Cela fait tout de même plus de 149 000 élèves ! Mais pour les autres, ils sont peut-être pris quelque part, mais pas forcément dans l’école, la filière qu’ils souhaitent.
L’angoisse des files d’attente
Ensuite, autre grande différence avec APB et qui a généré pas de stress chez les élèves, ce qui n’a pas rendu les révisions pour le bac faciles : auparavant, les échéances pour savoir si on était accepté ou non dans les filières demandées étaient fixées selon un calendrier mis à disposition en début d’année. Il y avait ainsi 3 ou 4 jours entre fin mai et août, où, quand on se connectait à APB, on avait une réponse à ses souhaits. Avec Parcousup, il peut y avoir des réponses tous les jours puisque les candidats sont obligés de se prononcer assez vite quand ils ont reçu une réponse, qu’elle soit positive (ils doivent accepter ou non la place) soit qu’ils soient mis en attente (ils peuvent renoncer à leur place). Ce qui fait que les élèves, déjà bien accros à leurs smartphones, ont passé des heures à mettre à jour leur application Parcoursup pour voir 1° s’ils étaient acceptés quelque part ou pire 2° s’ils remontaient dans la file d’attente qui se constituaient pour les filières les plus demandées. Et là, les angoisses étaient grandes quand ils ne se voyaient pas remonter assez vite ou quand ils recevaient une réponse positive pour un vœu, mais qui n’était pas leur préféré, et qu’ils stagnaient dans la file d’attente de leur vœu préféré. Avec l’obligation de se prononcer rapidement quant à leur décision d’accepter ou non la place proposée.
Des discriminations
Enfin, le principal problème à mon sens de Parcousup se sont les discriminations dont ont été victimes les élèves. La plus sévère est celle qui concerne l’accès à certaines études en fonction des filières. Il semble normal de dire et de penser que quelqu’un qui a obtenu un bac, qu’il soit un bac général, technologique ou professionnel, a… un bac. Et que l’enseignement supérieur lui est ouvert, certes en fonction de sa filière, de ce qu’il ou elle a appris, mais que c’est surtout un début, une nouvelle page, une nouvelle vie qui s’ouvre pour tous. On ne saurait préjuger des études supérieures d’une personne uniquement en fonction de ce qu’il ou elle a fait ou non durant ses études secondaires ! Pourtant c’est ce que fait Parcousup. Ainsi, les élèves de filières générales peuvent se permettre d’aller comme ils-elles veulent en université, en BTS, en DUT (suivant bien sûr les nouveaux critères de sélection), mais des élèves de filière technologique, se voient refuser l’entrée à l’université. On rétorquera que les filières technologiques n’ont pas pour vocation de former des universitaires… mais alors pourquoi les filières générales envoient-elles des élèves dans les DUT ou les IUT qui sont censés être les voies du supérieur pour les élèves sortant des bacs technologiques et professionnels ?! On en revient en fait toujours et encore à la question de l’orientation en amont : quand donc la société (et en premier lieu les parents !) arrêtera de croire que faire un bac général est la panacée alors que leur vocation est de former des … « généralistes » censés entrer à l’université, dans les écoles de commerce, les écoles d’ingénieur, etc. Sauf qu’un grand nombre d’élèves sont poussés (par tout un système, qui va de la pression sociétale, familiale et enseignante) à entrer dans ces filières alors qu’ils n’ont pas de goût pour les disciplines abstraites ni pour les études longues ! Et au contraire, il y a dans les filières technologiques, des élèves qui s’épanouissent avec des programmes plus concrets et qui reprennent confiance en eux et qui, en terminale, sont tout à fait capables de faire une carrière à l’université !
Changer de mentalité collective
Ainsi, la question de l’orientation, le problème de Parcoursup et les difficultés des établissements supérieurs, en particulier le manque de place dans les universités, reposent essentiellement sur une vision collective étroite de ce qu’est de réussir sa vie ! Et également sur cette façon, bien française, de juger les gens à partir de leurs diplômes, de catégoriser en fonction de ce que l’on apprit ou non à 17 ans ! Quand on aura compris ici que l’on apprend toute sa vie, que l’on change aussi toute sa vie, que l’on ne doit pas penser que l’on devra rester immobile dans une fonction toute sa vie, alors on pourra proposer aux jeunes générations autre chose qu’une compétition inutile et épuisante vers des formations qui ne leur plaisent pas… surtout quand on voit le taux de reconversion professionnelle chez les jeunes cadres et autres ingénieurs !
« Les DUT et les IUT » : le DUT est le diplome préparé dans les IUT….
Les IUT n’ont pas été créés pour caser les bacs professionnels et techno, mais pour « détourner » des études longues de bons éléments qui seraient partis en fac et en faire des techniciens supérieurs à Bac + 2 immédiatement absorbés par le marché du travail à l’époque (dans les années 60-70).
https://fresques.ina.fr/jalons/fiche-media/InaEdu01803/la-creation-des-instituts-universitaires-de-technologie-iut.html
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Effectivement c’est une erreur de ma part j’ai écrit trop vite : je voulais dire les BTS et pas les DUT.
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Ayant eu droit à APB, je vois la différence avec tout ce qui se dit avec Parcours sup… Ce que tu dis ne fait qu’enfoncer le clou, malheureusement !
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